Friday, January 18, 2008

2008 vs 2007 ?

A la base j'avais écrit ces voeux pour les publier dans un webzine, mais j'ai pas reçu de réponse, pas même d'accusé de réception. Soit ils ont trouvé ça trop politiquement incorrect, soporifique et long, soit ils s'en foutent. Alors je profite de mon blog pour les publier ! Vous sentez pas obliger de tout lire si ça vous soûle et/ou vous désespère !

Ce Réveillon de la St Sylvestre m’a laissé un goût d’inachevé…

Non, non… Ce n’est pas que le repas ait été mauvais, ni les boissons d’ailleurs (encore que le Muscat ne passait vraiment pas…)

C’est juste… Je ne sais pas.

J’aurais bien voulu avoir tous les miens autour de moi, peut-être sortir et faire une nouba d’enfer, claquer mes tunes — ou celles des autres, hein ? — comme un président tout juste élu.

Mais voilà, on ne dépense pas l’argent qu’on n’a pas.

En fait, ce n’est que deux jours plus tard que j’ai compris ce qu’était ce goût d’amertume : des relents de toute une année pourrie, trop salée pour moi, et pour beaucoup d’entre nous.

Je n’entends, dans une certaine presse, que parler de la France qui réussit, de ces politicards bling-bling qui tireront la France d’en bas vers le haut…

Je n’entends, autour de moi, que des amis, des proches, des parents me raconter des boîtes qui coulent, le chômage et la misère qui guettent… Et les retours au pays en charter.

Pourquoi n’ai-je réalisé d’où venait cet arrière-goût que deux jours plus tard ?

Trois ou quatre épisodes croisés m’ont donné une image du 2007 finissant et m’ont également laissé une impression de ce que pourrait être 2008 :

  1. la Poste
  2. le bureau de tabac/la station de métro
  3. les poubelles en bas de chez moi

La poste ? Je me pointe bien 15 mn avant 18 :00, heure fatidique de la levée du courrier. Mon recommandé ne partira que le lendemain. Et pour cause, j’arrive au guichet à 18 :30… C’est que ça se bouscule, ça se double sans scrupule, avec des airs de ni-vu-ni-connu-je-t’embrouille ou de vierge effarouchée.

Après avoir un peu joué des coudes et fait la grosse voix, je peux donc affranchir ce satané bidule.

Je dis en rigolant à la guichetière :

« Bah dis donc, on pourrait croire que c’est le seul jour de l’année où vous êtes ouverts ! »

Elle m’explique que je ne crois pas si bien dire, que ça s’est calmé, qu’elle avait quand même fait cent opérations sur la journée… Tout ça parce que les gens viennent s’occuper de leurs intérêts… ça pourrait être aussi bien le 18 juillet à 14 heures, qu’elle me dit.

Je suis resté un peu interdit. J’imaginais tous ces gens flippés par un avenir menaçant de leur tomber sur le coin de la gueule, épargnant quand même, parce que bon, il faut bien, hein, ma petite dame.

En guise de conclusion, la postière me dit que maintenant on peut faire ses recommandés directement sur Internet. Chouette, super, belle avancée technologique. C’est vrai, c’est bien pratique…

Ce qui m’amène à ma hantise apocalyptique de fin d’année, en rapport avec le point 2 — le métro (et également le bureau de tabac).

Dans cette mégalopole moribonde, vivant encore au rythme des secousses émétiques du Réveillon, un vrai défi m’attendait.

Trouver un coupon de carte orange mensuel. Parce que les avancées technologiques c’est ça aussi : on automatise.

Et on chomatise à tout va et pourquoi pas ?

Comme disait Coluche, une machine ça touche pas de salaire, ça fait pas grève, et le plus fort… ça a même pas besoin de travailler !

Je suis sûrement une tête de mule, de ne pas vouloir upgrader, depuis des mois au passe Navigo.

Flemme d’une part, volonté de ne pas me faire fliquer d’autre part ? Et dire non, d’une certaine façon aux suppressions de postes que suppose le fait de pouvoir recharger son passe n’importe où, sans avoir besoin de personne. Vous l’aurez remarqué comme moi, il y a moins de points de vente dans les stations... ils sont fermés une fois sur deux ou remplacés par des points d’accueil, qui en fait ne servent pas à grand-chose…

Quoi qu’il en soit, j’arrive au tabac en me disant… là, ils auront peut-être des coupons, qui sait ?

Le choc, déjà, quand je passe devant avant d’y rentrer :

C’est vide ! Je dirais même, si c’était français : Super vide !

Sur les coups de 18 :30 pas un chat… pas même un chaton. Bon allez, si, il devait y avoir 5 ou 6 clients. Et pas un nuage de cigarettes !

C’est beau les lois anti-tabac. Plus de cancers collectifs, maintenant, les fumeurs devront faire ça chez eux, à la rigueur en famille, parce que c’est plus convivial tout de même. C’est sûrement une bonne façon de commencer 2008, non ? Entrer dans un bar sans avoir la puanteur des clopes qui s’accroche à vos poumons comme les rejets de pétrolier dégueulés sur les plages bretonnes ! J’imagine que ça va réconcilier une partie de la population avec ces « lieux de perdition ». Je garde un souvenir peu agréable de pas mal troquets immondes, jonchés de clopes écrasées avec des poivrots en phase terminale de cirrhose. 2008 : sans mégots, mais en conservant les poivrots, ça sera toujours ça de pris.

Remarquez, ça sentait encore la cigarette. Je me demande combien de temps cela va rester dans les murs avant de se dissiper tout à fait.

Voilà, une société clean en apparence…

La buraliste n’a plus de coupon… Elle me renvoie en fait à « la station de métro la plus proche ». Classique.

Mais de fait, ma station de métro en avait bien, des coupons de carte orange. J’avoue que je ne comprends pas trop. Ils sont un peu pénibles à la RATP, non ? Alors qu’à République, et dans d’autres stations, ils n’en vendent plus… !

Je finis mon périple qui me ramène chez moi, content comme tout de mon achat ! Et je déchante assez vite… En bas de mon immeuble, deux trois personnes farfouillent les poubelles pour se faire le Noël qui leur aura été refusé. Noël en retard qui consiste à récupérer ce que les gens ont jeté, une semaine après le passage du vieux barbu en rouge justement.

Société de consommation de merde… A laquelle je participe à fond, j’en ai bien conscience. La phrase de Clive Barker, dans Le jeu de la damnation ou Imajica : « Nous croulons sous le poids de nos propres excréments » me revient souvent en mémoire.

Vous me direz… Bah il ne parle que de la France, là, il ne dit pas un mot sur le reste du monde… Allons, c’est déjà assez déprimant comme ça, on s’arrête ici pour le moment, hein ?

Sinon pour 2007 et comme j’ai allégrement passé mon temps de parole à patauger dans le réel, sur le refrain de Raphaël : « Mais on est dans le dur, pour cette vie c’est sûr », je dirai que je retiendrai de l’imaginaire… Des œuvres louchant le plus souvent sur le réel, comme par hasard.

A scanner darkly m’a mis une baffe monumentale, Le Prestige m’a laissé KO, la série Carnivale (faiblement traduite par le Carnaval de l’étrange) m’a rouleau-compressé, Jekyll, bijou de la BBC, avec sa réplique « Trust me, I’m a psychopath » m’a achevé.

J’ai pu lire (et même traduire et réunir dans une anthologie — trafiquants de cauchemars !) de très bonnes nouvelles d’auteurs espagnols et latinos — en vrac : Carlos Gardini, Sergio Gaut Vel Hartman, Fabio Ferreras, Santiago Eximeno, Joaquin Revuelta, Eduardo Vaquerizo… Et des français aussi, si, si… Berrouka (qui m’a traité de vieillard cacochyme au trois quart sénile d’au moins… soixante ans), Nathalie Dau (oui, elle, elle a droit à un prénom, pour la peine !), Mélanie Fazi (ça c’est bon, ça coco !), Dufour, Dufour bien sûr avec son « Immaculée conception », Noirez, et tant d’autres… Je n’oublierai pas de sitôt l’excellent roman Peregrinos de Marte de José Antonio Suárez. Et je vous conseille de guetter la sortie en ligne et gratuite, donc, de la traduction du recueil de micronouvelles Miniloquios y cementerios de Alfredo Álamo (Ediciones Efímeras), à moins que vous vouliez dévorer ces horribles petites friandises tout de suite, dans leur langue d’origine :

http://www.edicionesefimeras.com/aware.html

Si on doit rentrer un peu plus dans ma vie privée d’auteur « merveilleux », 2007 a été l’année où j’ai flirté avec Lunatique et Black Mamba, suis parti en voyage de noces avec Borderline, ai divorcé avec Faërie, après un mariage même pas consommé, ai soupiré (un peu) auprès de Fiction, ai vécu de torrides aventures exotiques avec Axxón et Qliphoth… Beaucoup de choses, mine de rien. Et je ne vous parle pas des cochonneries faites avec les maisons d’éditions, je n’évoque que les revues, là… Espérons que 2008 m’apporte de bons gros enfants littéraires, aux joues roses et aux pages bien remplies.

Bon allez, bons vœux à tous, quand même ! Malgré mes ronchonnades sur l’état déplorable de notre pôôvre vieille Terre. On verra bien ce que nous réserve cette année sans fumée — ce qui ne nous épargnera pas de nombreuses fumisteries médiatiques…

Je vous souhaite d’avoir autre chose qu’un arrière-goût en bouche : puissiez-vous croquer la vie à pleines dents, croquer de juteux fruits de réussite, de succès, d’amour, en ayant la santé !

Car 2008 ne pourra pas être plus pourri que 2007... ? Comment ? Si ???

8 comments:

Céline Brenne said...

Gloups... :-(
Ben dis-donc faut avoir le moral pour lire tes bons voeux jusqu'au bout...
Sérieusement, je ne suis pas loin de partager ton avis sur l'état du monde. Malheureusement, je n'ai pas les moyens physiques de rendre le monde meilleur en claquant des doigts. Alors je me contente de rester "simple" même si ce n'est pas facile par les temps qui courent...
Surtout il ne faut pas oublier les projets qui nous tiennent à coeur et qui nous font avancer malgrès tout!
Bisous et bon courage,
Céline
Dame à la Licorne.

Jacques Fuentealba said...

oui, je me rends compte que l'exercice était à la fois quand même nombriliste et déprimant à souhait. A notre niveau, on peut faire quelques petites choses autour de nous, selon les dons, les talents qui nous ont été donnés par la Nature/par Dieu et ceux que nous avons développés. Parfois, il y a des gens qui voudraient soigner la souffrance du monde, jusqu'à l'épuisement. Je ne suis pas de ses altruistes, même si je trouve le geste beau et courageux.
Oui, les projets, c'est ça qui nous tient, effectivement !

;-)

Georges said...

Depuis quelque temps, je suis en train de regarder le monde à travers un nouveau filtre de tri, dont l'efficacité m'effraye: ça marche trop bien pour être vrai.
Quel est ce filtre: séparer les actes et les interprétations entre deux philosophies contradictoires, l'une que j'appelle "constructiviste" (et qui, d'une certaine façon, résume ma façon de vouloir voir le monde), l'autre que j'appelle "prédatrice" et qui semble, de plus en plus, sous-tendre les visions, les interprétations et les actes de la plupart des gens (et qui autorise des positions apparemment contradictoires suivant où on se situe dans la chaîne de prédation.
Parmi les principes des prédateurs, il y a ce sous-entendu: "Rien ne se pert, rien ne se crée; si je veux quelque chose, il faut que je le prenne aux autres; et si j'enlève quelque chose aux autres, je gagne." Principe qui, à mon avis, ne cesse de provoquer destructions et gènes qui enlèvent à tous, en particulier au responsable: les embouteillages où le principe de tous est: d'abord bloquer les autres; tant pis pour moi si je suis bloqué aussi. Ensuite la resquille (par exemple à la poste) qui aboutit à faire perdre du temps à tout le monde, y compris au resquilleur (qui est content parce qu'il a fait perdre du temps aux autres). Le vandalisme (comme si en détruisant qqch on se l'appropriait... Bref des cercles vicieux en tous genres qui, de plus en plus, se substituent aux "cercles vertueux" des années de progrès où ceux qui voulainet gagner qqch avaient compris qu'ils gagnaient en partageant et que accaparer une richesse l'enlève aussi à l'avare...
Comme je l'ai dit, malgré le couteau de Guillaume Occam, le fait que tant d'explications semblent s'accorder avec un seul motif sous-jacent dérange ma volonté de logicien de chercher la certitude. Mais je suis encore à la recherche du fait qui ne se laissera pas interpréter par ce filtre...

Jacques Fuentealba said...

Georges, je crois que ton constat est encore plus déprimant que le mien... :-(

Anonymous said...

Travailler plus, gagner plus...
Moins de temps pour vous plaindre que le monde va mal...
Demain ne sera pas pire qu'hier, car le présent est toujours un moment difficile à vivre...

Jacques Fuentealba said...

Hé bah, t'es pas très réjouissant non plus, mon ami !!

Anonymous said...

très bien écrit. Comment veux tu qu'on t'ecrives quelque chose de réjouissant alors que ton article est déprimant. Je me pose encore le question: faut il dénoncer tout ce qui ne va pas pour sa faire souffir? OU bien faire semblant de ne rien voir et vivre égoistement? (je suis impuissante à tout cela, face à ce que la société est devenu! c'est ce qu'on dit mais les Hommes ont toujours été ainsi, les pauvres s'appauvrissent et les riches s'enrichirissent sur leur dos. Or c'est le reve de tout un chacun d'etre riche, d'avoir du succès et une vie facile....) voilà ça suffit, je me déprime encore....

Céline Brenne said...

Ouh la. Eh, c'est bien d'être réaliste sur la misère du monde, mais faut quand même pas tout prendre pour soi!
On peut construire son propre petit bonheur sans pour cela tomber dans l'égoïsme et l'aveuglement.
Le juste milieu, c'est la meilleure voie selon moi.
Alors arrêtez de vous morfondre! Vous avez fait quoi à votre échelle aujourd'hui pour rendre un être heureux?
Si vous pouvez répondre autre chose que "rien", alors vous avez rendu le monde meilleur.